Il est donc temps de partir.
Au seuil de l'ouverture du troisième mouvement du prophet-trip, Salamandre422, trop laconique ces dernières semaines, prends quelques instants pour se repencher sur celles-ci.
Jefferson-Jefferson, ou la cité de l'échec et de l'ennui. L'animal aura pourtant donné bien du mal en pâture pour tenter de s'y enjoyer.
Gipsy était Perse, d'une beauté redoutable et typée, d'un entrain édifiant et d'une obsession sans borne pour la gent masculine. Sa compagnie fut parfois drôle, parfois rafraîchissante, trop souvent désespérante quand elle se révélait si futile, clubeuse selon les standars locaux, vaine.
Son frère, tout aussi Perse, tout aussi sublimé d'orient, était beau comme le jour et fougueux comme une moissonneuse-batteuse. Le premier point ayant amener l'animal à tenter la chance, le second à ne plus tenter le (beau) diable.
Le cloporte a fait partie de cette communauté d'immigrés aux bas salaires, parlant peu le langage local. Elle a connu cette situation un peu absurde, un peu étrange où cinq étrangers possédant chacun son dialecte et ne bafouillant que bien mal le jeffersonnien, discutent de leurs situations, sur la patte unique de leur baragouinage obscure, avec néanmoins l'animation d'une vraie conversation. Et quand un local, un supérieur qui plus est, seul possesseur du dit-langage, s'avance vers le groupe, Gipsy de le héler : « Nil, on parle de toi ! On dit qu'on ne comprend rien quand tu parles ! » et le groupe d'approuver et de rire.
L'animal, renonçant après maintes efforts à trouver un quelconque plaisir dans le divertissement nocturne commun, s'est égarée plus loin, aux alentours d'une caverne à grognements et barrissements. Elle y a fait la connaissance rapide d'un joueur de feu qui l'a conviée à quelques spectacles de sa troupe en dehors de la ville, invitation à laquelle elle a naturellement répondu. Ainsi donc elle a enfin touché la mer.
Ainsi l'animal découvre le bruissement du feu sur ses tympans et l'extase de la danse incandescente. Trop tard. Juste deux maigres jours avant de repartir.
Ayant dans son inénarrable étourderie laissé filer le temps du coche commun pour retourner au centre de la cité, l'animal, faisant honneur aux tendances kamikazes ou suicidaires passives qui ont rythmé sa vie entière, a marché, deux heures durant, le long de la route où filaient les voitures, en pleine nuit. S'arrêtant même pour prendre des photos puisqu'elle y voyait ses premiers beaux paysages. Toujours vivante, notez.
Pour résumer, l'essentiel ne fut qu'ennuie, désespérance. L'animal a somme toute réellement peu parlé, s'est senti isolé, est devenu un peu fou. L'espoir de trouver mieux ailleurs.
Hier et aujourd’hui, Salamandre422 a tout réglé, d'une main de maître.
Dans cinq heures et demi, le voyage reprend. Sans logement, sans personne, sans but. Droit vers le Sud.
Salamandre422, du chaos, du conflit, cherchant la plupart du temps à faire taire (ou peut-être parler, justement) le Darcy qui grogne en elle et lui rend la vie si ingrate, prouvera que le bonheur ne dépent pas que de l'effort, comme le répètent les beaux penseurs pour la tourmenter de complexes, mais bien aussi du contexte.